Le peroxyde d’hydrogène réagit avec le cuivre pour produire des radicaux hydroxyles dotés de fortes propriétés antibactériennes. Cependant, cela nécessite des concentrations élevées de cuivre car deux atomes de cuivre doivent se rapprocher, ce qui se produit par hasard. À présent, des scientifiques de l’Université des sciences de Tokyo, au Japon, ont conçu un long polymère avec des unités latérales contenant du cuivre qui créent des régions avec une densité de cuivre localement élevée, augmentant l’activité antibactérienne du peroxyde d’hydrogène et ouvrant la voie à un nouveau concept de conception de médicaments.
Génération de radicaux hydroxyles antibactériens en utilisant le cuivre comme catalyseur. Le polymère proposé, avec son squelette représenté en bleu, crée des régions avec une densité locale élevée d’unités latérales en cuivre (pendentifs). Cela aide à réduire Cu(II) en Cu(I), l’étape la plus difficile de la réaction redox montrée, pour finalement produire plus de radicaux hydroxyles (•OH). Avec l’aimable autorisation de la figure : professeur adjoint Shigehito Osawa
La découverte des antibiotiques a été une énorme percée en médecine, qui a permis de sauver d’innombrables vies. Malheureusement, leur utilisation généralisée a conduit à l’évolution rapide de souches bactériennes très résistantes, qui menacent de ramener l’humanité à la case départ dans la lutte contre les maladies infectieuses. Même si les chercheurs recherchent de nouveaux concepts de conception de médicaments antibactériens, le développement global de nouveaux agents est actuellement en déclin.
Pour s’attaquer à ce grave problème, des scientifiques de l’Université des sciences de Tokyo, au Japon, explorent une nouvelle approche pour stimuler la in vivo activité antibactérienne du peroxyde d’hydrogène (H2O2), un désinfectant couramment utilisé. Dans une étude récente publiée dans Communications rapides macromoléculaires, une équipe dirigée par le professeur adjoint Shigehito Osawa et le professeur Hidenori Otsuka ont signalé leur succès dans l’amélioration de H2O2 activité en utilisant des polymères contenant du cuivre soigneusement adaptés.
Pour comprendre leur approche, il est utile de savoir comment H2O2 agit contre les bactéries en premier lieu, et le rôle que joue le cuivre. H2O2 peut être décomposé en un radical hydroxyle (•OH) et un anion hydroxyde (OH−), dont le premier est très toxique pour les bactéries car il détruit facilement certaines biomolécules. Le cuivre dans son premier état d’oxydation, Cu(I), peut catalyser la scission de H2O2 en un radical hydroxyle et un anion hydroxyde, se transformant en Cu(II) au cours du processus par oxydation (Figure 1). Curieusement, H2O2 peut également catalyser la réduction de Cu(II) en Cu(I), mais seulement si cette réaction est facilitée d’une manière ou d’une autre. Une façon d’y parvenir est d’avoir des complexes contenant du Cu(II) suffisamment proches les uns des autres.
Cependant, lors de l’utilisation de complexes contenant du Cu(II) dissous dans une solution, la seule façon pour eux de se rapprocher est de se heurter accidentellement, ce qui nécessite une concentration trop élevée de cuivre. L’équipe a trouvé une solution à ce problème en s’inspirant de la chimie cellulaire, comme l’explique le Dr Osawa : «Dans les organismes vivants, le cuivre forme des complexes avec des protéines pour catalyser efficacement les réactions redox. Par exemple, la tyrosinase a deux sites complexes de cuivre à proximité l’un de l’autre, ce qui facilite la formation d’intermédiaires de réaction entre les espèces oxygénées et les complexes de cuivre. Nous pensions pouvoir exploiter ce type de mécanisme dans des polymères produits artificiellement avec des complexes de cuivre, même dispersés dans une solution.«
Avec cette idée, les chercheurs ont développé une longue chaîne polymère avec de la dipicolylamine (DPA) sous forme de complexes contenant du cuivre. Ces complexes DPA-cuivre étaient attachés au long squelette du polymère en tant que « groupes pendants ». Lorsque ces polymères sont dispersés dans une solution, les atomes de Cu(II) dans les groupes pendants sont maintenus à proximité et localement à des densités élevées, augmentant considérablement les chances que deux d’entre eux soient suffisamment proches pour être réduits en Cu(I) par H2O2. Grâce à diverses expériences, les scientifiques ont démontré que l’utilisation de ces polymères sur mesure a entraîné une activité catalytique plus élevée pour la division de H2O2, résultant en plus de OH• même pour des concentrations plus faibles de cuivre. D’autres tests utilisant Escherichia coli les cultures ont montré que ces polymères augmentaient considérablement le potentiel antibactérien de H2O2.
Bien que les résultats de cette étude ouvrent une nouvelle voie de conception pour les médicaments antimicrobiens, il peut également y avoir des applications utiles dans l’industrie alimentaire.
Le cuivre étant un nutriment essentiel pour les organismes vivants, l’agent antibactérien développé dans cette étude est prometteur en tant que conservateur alimentaire efficace, qui pourrait contribuer à augmenter la variété d’aliments pouvant être conservés sur de longues durées de conservation.
Shigehito Osawa, professeur adjoint, Université des sciences de Tokyo
Espérons que cette nouvelle stratégie nous permet de tenir plus facilement à distance les menaces microscopiques !