Une étude en Norvège a récemment mis en évidence une association significative entre l’altération du microbiote intestinal et un dysfonctionnement respiratoire persistant chez les patients atteints de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19). L’étude révèle qu’une diversité et une composition modifiées du microbiote intestinal ainsi qu’une augmentation des taux plasmatiques de protéine de liaison aux lipopolysaccharides (LBP) sont associées à un dysfonctionnement respiratoire chez les patients COVID-19, même après trois mois d’hospitalisation. L’étude est actuellement disponible sur le medRxiv* serveur de préimpression.
Sommaire
Arrière-plan
La gravité du COVID-19, une nouvelle maladie causée par le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2), dépend principalement de l’activation aberrante du système immunitaire et d’une inflammation systémique excessive. Récemment, l’implication potentielle de l’altération du microbiote intestinal dans la pathogenèse de COVID-19 a également été établie.
La communauté microbienne résidente dans le tractus gastro-intestinal (GI) joue un rôle vital dans la régulation des réponses immunitaires locales et systémiques. Dans ce contexte, certaines preuves récentes ont suggéré l’implication du microbiote intestinal dans la médiation des réponses inflammatoires chez les patients COVID-19. De plus, un lien a été établi entre la dysbiose du microbiote intestinal et le développement d’infections systémiques secondaires chez les patients COVID-19.
Dans la présente étude, les scientifiques ont cherché à savoir si une altération du microbiote intestinal pouvait provoquer un dysfonctionnement respiratoire chez les patients COVID-19 même après trois mois d’hospitalisation.
Étudier le design
Cette étude fait partie de l’essai de solidarité NOR, qui est une étude complémentaire indépendante à l’essai de solidarité de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) étudiant l’efficacité des médicaments antiviraux chez les patients hospitalisés COVID-19.
Un total de 181 patients hospitalisés COVID-19 ont été inscrits pour l’étude. Des échantillons de plasma ont été prélevés chez les patients à l’admission et après trois mois d’hospitalisation. Les marqueurs du dysfonctionnement de la barrière intestinale et de l’inflammation ont été analysés dans le plasma. Au suivi de 3 mois, la capacité de diffusion des poumons pour le monoxyde de carbone a été évaluée pour déterminer le dysfonctionnement pulmonaire. De plus, des échantillons rectaux ont été collectés et analysés pour la composition du microbiote intestinal.
Remarques importantes
Sur 181 patients inscrits, 149 ont terminé le suivi de 3 mois. Environ 48% des patients ont été traités avec des antibiotiques pendant l’hospitalisation. Des comorbidités telles que l’hypertension, le diabète et l’obésité étaient présentes chez 68% des patients. Seulement 6 % des patients ont déclaré avoir une maladie pulmonaire chronique.
L’axe intestin-poumon
Au suivi de 3 mois, un dysfonctionnement pulmonaire a été observé chez 30% des patients COVID-19 précédemment hospitalisés pour lesquels l’échantillon rectal et les mesures de la fonction pulmonaire étaient disponibles. De plus, ces patients présentaient une diversité réduite et une composition altérée du microbiote intestinal. Il est important de noter qu’aucun impact significatif de la consommation d’antibiotiques sur l’altération du microbiote intestinal et le dysfonctionnement pulmonaire n’a été observé chez ces patients.
Les résultats de l’analyse taxonomique ont révélé que les patients présentant une dysfonction pulmonaire après trois mois d’hospitalisation sont significativement associés à une abondance réduite d’Erysipelotrichaceae UCG-003 (un microbe associé à la production de butyrate) et à une abondance accrue de Flavonifracteur et Veillonelle. La plus forte association a été observée pour Veillonelle, qui est un pathogène opportuniste anaérobie associé à la fibrose tissulaire.
Marqueurs du dysfonctionnement de la barrière intestinale
Un lien entre le dysfonctionnement de la barrière intestinale et l’insuffisance respiratoire aiguë a été établi dans l’étude.
Au cours de l’hospitalisation, environ 33 % des patients ont présenté une insuffisance respiratoire aiguë. Chez ces patients, une association significative a été observée entre l’augmentation des taux plasmatiques de lombalgie et l’insuffisance respiratoire. Selon la littérature disponible, une fuite accrue de LBP du tractus gastro-intestinal peut résulter d’une infection sévère par le SRAS-CoV-2, qui peut par la suite augmenter la gravité du COVID-19 en activant de manière aberrante le système immunitaire inné.
Alors que le niveau de LBP montrait une élévation persistante pendant l’hospitalisation et une baisse progressive au fil du temps, l’inverse a été observé pour un autre marqueur de dysfonctionnement de la barrière intestinale, REG-3α, qui est une lectine bactéricide de type C aux propriétés antibactériennes.
Chez les patients présentant une dysfonction pulmonaire après trois mois d’hospitalisation, le taux plasmatique de LBP est resté élevé. De plus, une association significative a été observée entre des niveaux de LBP constamment élevés et des marqueurs d’inflammation systémique, notamment le niveau de protéine C réactive et le nombre de neutrophiles.
Importance de l’étude
L’étude met en évidence un rôle potentiel du microbiote intestinal dans la détermination des conséquences cliniques aiguës et persistantes du COVID-19. Comme l’ont mentionné les scientifiques, l’axe intestin-poumon établi dans l’étude devrait être étudié plus avant en tant que facteur de risque potentiel de COVID long.
*Avis important
medRxiv publie des rapports scientifiques préliminaires qui ne sont pas évalués par des pairs et, par conséquent, ne doivent pas être considérés comme concluants, orienter la pratique clinique/le comportement lié à la santé, ou traités comme des informations établies.